L’agenda de Gaétan Barrette

Avec le dépôt du projet de loi 20 sur le travail des médecins omnipraticiens, le ministre de la santé du Québec, Gaétan Barrette, s’est mis à dos un grand nombre de ceux-ci.

Des médecins omnipraticiens se font entendre pour dénoncer différents aspects de ce projet de loi qui forcerait ces médecins aux talents pluri-disciplinaires à prendre plus de patients à leur charge.

Dans les fait, l’idée serait de forcer ces « omnis » à prendre bien plus de patients afin que tout le monde au Québec puisse avoir « son » médecin. Et le ministre Barrette veut aller vite, d’où le recours des libéraux provinciaux à une motion de baillons pour faire passer sa loi, sans réel débat.

À la défense du ministre Barrette, on constate que l’accès à un médecin de famille ne fonctionne pas. Il faut un remède de cheval pour corriger le tir.

Ceci dit, il faut se demander si le projet de loi libéral, piloté par le ministre Barrette est la bonne solution. Si les « omnis » s’enlignent pour boycotter la loi 20, d’une manière ou d’une autre, personne n’en sortira gagnant.

Rappelons l’agenda actuel du ministre Gaétan Barrette:

Projet de loi 10 

Voit à modifier l’organisation du réseau de la santé, notamment en abolissant les agence de la santé et en faisant passer de 182 à 33 le nombre d’établissements dans le réseau mais avec le même nombre d’employés.

Projet de loi 20

Pour améliorer l’accès aux services de médecine de famille, ce projet de loi oblige les médecins de famille à prendre en charge un nombre minimal de patients et à travailler 5 jours par semaine, 42 semaines par année (10 semaines de vacances, un peu comme les professeurs). Une diminution de salaire de 30% serait imposée à un médecin s’il ne prend pas en charge un nombre déterminé de patients. Les médecins à l’argent atteindraient peut-être leur quota de patients mais les serviraient-ils bien?

Projet de loi 28

Projet de loi du ministre des Finances, Carlos J. Leitao qui prévoit entre-autre de réduire de 177M$ les honoraires des pharmaciens.

Clairement, il s’agit de changements demandés par les citoyens qui sont à bout de souffle, financièrement et qui n’arrivent même pas —pour la plupart— à trouver un médecin de famille pour eux, leur douce-moitié, leurs enfants ou leurs parents. Les médecins font assurément leur possible avec les moyens qu’ils ont mais à l’évidence, ce n’est pas encore assez, d’où l’agenda règlementaire du ministre Barrette.

Personne ne veut épuiser les médecins mais l’organisation actuelle du travail rend le système de santé universel inaccessible ou si peu accessible qu’il faut trouver des alternatives (notamment la médecine privée, via de coûteuses assurances privées) alors que ce système est censé être pleinement accessible et efficace. Comme ce n’est absolument pas le cas, il faut interpeler les médecins (avec ces nouvelles lois) afin qu’ils puissent mieux répondre aux attentes des citoyens qui paient leur salaire, passablement considérable, comparé au reste des travailleurs.

Mais bon, il y aura toujours le bon médecin qui donne sa vie à son travail comme s’il s’agissait d’une vocation et l’autre, le mauvais médecin qui se préoccupe d’abord de son petit bonheur, au point de ne pas se rendre suffisamment disponible pour les citoyens qui auraient besoin de ses services ou encore, en précipitant un diagnostique destiné à se débarrasser du patient, en quelque sorte. Tchi-à-tchik, l’argent est en banque et le patient n’aura qu’à s’organiser avec ses pilules! Ces deux types de médecins existent et travaillent, souvent dans les mêmes unités. L’un trouve que l’autre ne s’investit pas assez dans son travail alors qu’à l’inverse, le mauvais médecin ne comprend pas pourquoi le bon se donne autant, au péril de sa propre santé. Tout dépend du point de vue.

Tout ça nous fait réfléchir, en tant que contribuable.

Et si cette montée mutuelle des boucliers entre le ministre Barrette et les médecins n’était qu’une toute petite composante qui explique pourquoi notre système de santé universel l’est de moins en moins, notamment parce que nous n’arrivons plus à le financer. Si le problème se trouvait ailleurs.

Pour un médecin, un restaurant servant une nourriture industrielle dénuée de valeur nutritionnelle est une insulte à la face de son intelligence qui comprend qu’il s’agit d’un lieu où la santé se perd. D’un autre côté, chaque repas y étant servi contribue à créer un futur client. Un patient qui lui rapportera beaucoup d’argent. Alors, au fond, le médecin peut s’offusquer qu’on veuille le faire travailler davantage pour soigner tous ces patients mal-en-point mais au fond, ce médecin n’est-il pas victime de sa complaisance face à une nébuleuse de causes à l’origine des problèmes de santé sans cesse plus complexes, de ses patients? Si ce médecin avait exigé des changements règlementaires pour exiger un niveau-plancher à la qualité nutritionnelle, dans les restaurants (pour ne pointer que cette problématique documentée), n’y aurait-il pas moins de patients à soigner? Obésité, diabète, hypertension artérielle et autres conditions nécessitent de coûteux suivis médicaux qui épuisent financièrement les contribuables et physiquement, les médecins.

Heureusement, on voit plusieurs médecins sortir sur la place publique pour défendre le sens commun et suggérer de meilleurs choix de vie aux Québécois. Malheureusement, le pouvoir politique a tellement peur de nuire aux flux économiques actuels qu’il accepte n’importe quelle ineptie, au nom de l’économie. Le docteur Barrette ne semble pas intéressé à régler les problèmes avant qu’il n’en deviennent. Son agenda actuel va dans le sens de presser le citron des médecins, à tort ou à raison, plutôt que de modifier certaines habitudes de vie des Québécois et ce, d’une manière décisive et coordonnée.

On ne devrait pas mais juste pour se faire une tête, parlons de quelques problématiques très réelles, au Québec:

  • Tabagisme
  • Alcoolisme
  • Drogues
  • Comportements compulsifs
  • Maladies mentales non-diagnostiquées, donc non-traitées
  • Obésité, incluant l’obésité morbide
  • Mauvais choix nutritionnels
  • Abus des médicaments
  • Blessures physiques nées de comportements négligents ou à risque
  • Problèmes émotionnels originant d’un milieu de vie dysfonctionnel

Vous voyez où on s’en va.

On attaque des pratiques médicales plutôt que d’attaquer, en premier lieu et en priorité, des problématiques de santé qui échappent actuellement à notre contrôle parce que le pouvoir politique CHOISIT de se fermer les yeux, dans une large part même si ces inquiétants problèmes sont visibles, dans notre vie de tous les jours.

Soi-même, un proche, un parent, un voisin, une connaissance ou un parfait étranger souffre, en ce moment, au Québec.

photo-de-gaetan-barrette

Au niveau politique, c’est le jeu de l’autruche qui se cache la tête dans le sable afin de mieux ignorer le danger que posent ces problématiques de santé.

Est-ce que les projets de loi du docteur Barrette vont vraiment améliorer les choses, au Québec? On espère que oui mais la preuve reste à faire. 

Claude Gélinashttps://videos.claude.ca/
Passionné des communications numériques, du développement web, de l'infographie et des avancées technologiques, au sens large.

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